2009-2
Travailler aux marges. Un cordon sanitaire pour la société ?
10,00 €
Danilo MARTUCCELLI
Les logiques plurielles du cordon sanitaire
L’article explore les différentes figures contemporaines de la logique du cordon sanitaire. Mettant en question sa seule réduction aux processus de réclusion ou de mise à distance spatiale de certaines populations, il montre son importance dans deux autres types de conduites : le morcellement croissant des expériences malgré la proximité et la problématisation généralisée de nos échanges avec autrui. Le cordon sanitaire apparaît ainsi comme un analyseur important des sociétés actuelles.
Colette BEC
Crise de l’État social ou crise de la démocratie ?
Les décennies 1980-1990 en France ont pu faire craindre la disparition de l’État social. Il n’en a rien été et l’investissement de l’État dans ces fonctions reste très important financièrement et politiquement. Mais sous cette continuité apparente se joue en fait une mutation d’importance qui ne touche pas qu’aux modes de protection mais à la légitimité même des interventions publiques. Cet article fait l’hypothèse que ce qu’il est convenu d’appeler la crise de l’État social est d’abord une crise politique due à une crise de la démocratie.
Dominique LHUILIER
Travail du négatif – travail sur le négatif
La production du négatif psychosocial fonde la division entre scène et coulisses
où œuvrent des professionnels en charge du « sale boulot » : ils ont à la fois à « traiter » ce qui est rejeté par le corps social et à contribuer à l’entretien des pactes dénégatifs par la neutralisation de ce qui est rejeté à la marge ou dans l’oubli. Pour l’ensemble de ces professionnels, la question du sens et de la reconnaissance du travail se pose de façon singulière : affectés au traitement de ce qui est constitué, par le procès même de la projection-expulsion, comme « mauvais objet », ils sont eux condamnés à une impossible occultation du réel que tentent de masquer mythes et discours. Et c’est dans les collectifs de travail, entre pairs, que peuvent se reconstruire les visées et la validation des pratiques de chacun, comme les repères symboliques qui permettent de domestiquer les résonances fantasmatiques avec l’« objet » de travail. Encore faut-il que les conditions nécessaires au développement du métier comme instance tierce soient préservées.
Guillaume MALOCHET
Peut-on former les surveillants de prison ?
Si les surveillants sont bien des professionnels du « cordon sanitaire », il faut reconnaître que les orientations institutionnelles et les conditions dans lesquelles ils exercent leur travail les placent face à un dilemme. Comment résoudre la tension constitutive entre garde et réinsertion ? Parmi les nombreuses voies que peut emprunter la modernisation de cet univers, l’administration pénitentiaire a régulièrement mis en avant le rôle de personnels mieux formés, sensibilisés aux exigences de ce travail de la relation, instruits du double aspect, indissociablement sécuritaire et social, de leur activité. Mais l’ambition de ces discours, parfois traduits en principes de réforme, s’est toujours affrontée à l’inertie d’une institution prompte à se sentir mise en danger. Le repli sur les aspects techniques et sécuritaires du métier est, aujourd’hui comme hier, la réponse la plus simple. Les orientations actuelles de la formation en sont la traduction.
Daniel THIN
Des dispositifs entre remédiation et externalisation des problèmes scolaires
Les dispositifs relais ont été mis en place à la périphérie de l’institution scolaire pour recevoir les collégiens dont les pratiques sont contraires à l’ordre et aux règles scolaires. L’analyse montre que ces dispositifs sont au croisement de plusieurs logiques entre remédiation aux difficultés des élèves et maintien de l’ordre scolaire par la mise à l’écart des collégiens. Du coup, les dispositifs relais ne se laissent pas saisir de manière univoque et peuvent relever d’analyses différentes selon le point d’où on les regarde. Des recherches sur lesquelles se fonde cet article, on retiendra surtout que l’action des dispositifs relais est tramée par la tension entre ces deux logiques.
Marcel JAEGER
Un positionnement professionnel difficile à construire. Le cas des éducateurs spécialisés
En dépit de la reconnaissance sociale de leur action professionnelle comme « réponse » aux difficultés de passage de la marginalité à l’intégration, les éducateurs spécialisés sont en proie à un malaise qui se traduit par leur difficulté à élaborer des stratégies professionnelles tant envers les usagers que dans leurs rapports aux pouvoirs publics. Cet article propose trois pistes de réflexion en s’appuyant principalement sur l’exemple du travail avec les jeunes dits « difficiles ». La première concerne le mode de construction historique de la profession d’éducateur spécialisé. La deuxième s’intéresse aux difficultés de ce groupe à construire sa professionnalité. Enfin, l’article analyse comment ce malaise se traduit par un flottement dans les stratégies professionnelles, phénomène d’autant plus problématique qu’il fait écho au flottement des politiques publiques.
Stéphane RULLAC
Le travail social face à la « question SDF ». Vers un complexe punitivo-assistanciel inédit ?
L’abrogation des délits de vagabondage et de mendicité, dans le nouveau Code pénal de 1992, a instauré une crise dans le mode de régulation sociale de ceux qui sont alors devenus des SDF. En supprimant la possibilité de recourir à la police et la justice, le corps social a été amené à élaborer un nouveau compromis pour autoriser l’existence sociale de ceux qui représentent toujours une déviance sociale. Le travail social est appelé à poursuivre, sous une autre forme, la relation répressive que la société réserve aux sans-abri depuis des siècles. C’est ainsi que le nouveau secteur dédié aux SDF constitue un complexe « punitivo-assistanciel » inédit.
Alexandre BIOTTEAU
Médiation urbaine : vers une régulation sociale en circuit fermé
Depuis les années 1990, des milliers d’emplois de médiation urbaine ont été créés dans l’objectif officiel d’aider la population et de lutter contre l’insécurité. Essentiellement occupés par des jeunes issus des quartiers défavorisés, et le plus souvent envoyés au-devant des habitants des mêmes quartiers, ces emplois inaugurent une nouvelle forme de régulation des comportements. Au nom d’une meilleure efficacité, les origines sociales et « ethniques » sont prises en compte par ces dispositifs d’action publique. Entre bénévolat et emploi d’insertion, les médiateurs urbains doivent ainsi circonscrire les désordres que génèrent les « jeunes de quartiers » tout en maintenant une partie de cette population à l’écart du marché du travail.
Urban mediation : social regulation in a closed circuit ?
Patrick NIVOLLE
Les ambiguïtés du dispositif « Adultes relais ». Instrument de contrôle ou contre-pouvoir des populations ?
A partir d’une recherche menée par le Centre d’études de l’emploi sur les adultes relais, cet article montre combien la médiation sociale et culturelle reste liée à un impératif d’intégration et de lutte contre l’exclusion laissant trop peu de place à la négociation et à l’égalité de parole. Il met en lumière le risque d’une assignation des populations dans des espaces géographiques et sociaux desquels elles ne peuvent s’échapper. Partant de ce paradoxe, l’article insiste en contrepoint sur certains usages du dispositif par des associations qui tentent d’échapper à cette vision négative des populations en s’appuyant sur une démarche éducative promouvant l’autonomie individuelle, plus rarement l’organisation collective de la parole des habitants pour peser sur les décisions locales. Il pose enfin la question de la reconnaissance de ces nouveaux professionnels, condition de la reconnaissance de la singularité de leur fonction dans l’intervention sociale, notamment dans sa dimension de support à la démocratie locale.
Mélanie GUYONVARCH
À la frontière de l’emploi, le reclassement des travailleurs licenciés.
L’accompagnement social du licenciement par les cabinets privés d’outplacement Cet article étudiee la place des cabinets privés dans la gestion d’une population particulière – les salariés licenciés – dans cet « entre-deux de l’emploi » que constitue la période du reclassement. La prise en charge de l’accompagnement social pose un certain nombre de problèmes : la professionnalisation de l’activité est limitée et le marché peu stabilisé ; la prise en charge externalisée de l’entreprise pose la question du partage de la responsabilité entre les acteurs et de leur coordination ; les contraintes temporelles et économiques auxquelles sont soumis les consultants engendrent des tensions dans les objectifs mêmes de leur mission de reclassement.
Corinne LESPESSAILLES, Madeleine MAILLEBOUIS
Les institutions et les professionnels confrontés aux indésirables
Bibliographie
Jacques DENANTES
L’insertion des jeunes sans qualification. L’expérience de l’ACEREP entre 1972 et 1986
L’ACEREP a été créée en 1973 sous l’égide de la Caisse des dépôts avec pour objectif d’aborder par la formation le chômage des jeunes. Les enquêtes en Seine-Saint-Denis avaient révélé une population de faible niveau scolaire et coupée de la vie active. En alternance avec la formation, les jeunes ont été mis en contact avec de petites entreprises qui avaient un potentiel de création d’emploi. Les formateurs jouissaient d’une large initiative qu’ils devaient justifier par des rapports écrits. Cette marge d’innovation s’est dissoute dans la normalisation des programmes. La tentative de constitution d’une structure appuyée sur les collectivités locales n’a pas abouti et l’ACEREP, engluée dans ses conflits internes, n’a pas utilisé l’espace d’initiative que lui ouvrait l’appui de sa maison-mère.
Laurence CAMBON–BESSIÈRES
Les formateurs pénitentiaires face à la simulation
Cet article est issu d’une recherche consacrée à l’analyse de l’implantation d’une nouvelle modalité pédagogique – la simulation – dans la formation initiale des surveillants de prison. L’objectif est d’analyser les incidences de la simulation sur la situation professionnelle des formateurs exerçant à l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire. Autrement dit, il s’agit de questionner la diffusion d’une invention et de saisir les manières dont les formateurs vont s’approprier la simulation et la considérer ou non comme une pratique légitime. La simulation renforce t-elle la robustesse du système ? Ou au contraire, cette invention et notamment la manière dont elle a été implantée dans le système devient-elle un facteur de déstabilisation pour les formateurs ?
Evelyne SIMONDI
De la doxa professionnelle à une figure dialectique de l’expertise en travail social
A partir du sens commun de la notion d’expertise en travail social et de ses quatre figures historiques du XIVe siècle à nos jours, une cinquième figure est proposée en termes d’expertise-située. Celle-ci renvoie à des savoirs de l’expérience qui sont à mettre en tension dans une temporalité reconsidérée. Deux postures professionnelles s’en dégagent qui nécessitent pour être dialectisées, une compétence non répertoriée dans les référentiels professionnels, une compétence de l’« entre-deux ».
Former des professionnels citoyens
grâce à l’apprentissage.
13,00 € – 15,00 €
2024-4
Les formations en santé.
21,50 € – 23,00 €
2022-4
Formation, coopération, émancipation. Expériences en économie sociale et solidaire
21,50 € – 23,00 €
2021-3
Didactique professionnelle et didactiques des disciplines. Filiations et ruptures
21,50 € – 23,00 €
2019 HS AFPA
Partir des compétences transversales pour lire autrement le travail
12,00 €
2018 HS AFPA
Le conseil en évolution professionnelle : rupture ou continuité ?
12,00 €
2015 HS AFPA
Quelles pratiques pédagogiques dans l’accompagnement des publics peu qualifiés ?
12,00 €